Alors que j’assistais, passionnée, en novembre dernier à la seconde édition du Campus de l’Innovation Managériale à Paris, je m’interrogeais sur la perception que cette représentation pouvait induire auprès des collaborateurs, des cadres et des dirigeants dans les organisations.
Selon une enquête réalisée en 2017 auprès des entreprises par la Chaire innovations managériales d’Audencia, administrée par l’institut BVA, seuls 15% des dirigeants font de l’innovation managériale leur priorité. Ils privilégient en effet l’innovation produit et service (44%), technologique (35%) et enfin managériale (29%).
84% d’entre-eux pensent que les innovations managériales visent à favoriser le bien-être des salariés et 75% considèrent qu’elles contribuent à la performance économique de l’entreprise.
Allons encore un peu plus loin.
63% de ces mêmes dirigeants ont le sentiment que leur management est innovant alors que cet avis n’est partagé que par 29% des salariés.
Si nous interrogeons des collaborateurs sur ce que signifie l’innovation managériale, ils répondent qu’il s’agit « d’un dispositif qui favorise la performance économique », « d’un moyen de les faire travailler plus », une façon de « bousculer les codes », « un concept défini par de grands beaux mots qui vont bien dans l’air du temps ». Seulement 40% des salariés français voient les innovations managériales comme des dispositifs pouvant favoriser leur bien-être.
Pourtant, l'innovation managériale est annoncée comme la capacité à pouvoir faire face aux grands défis à venir des entreprises.
Dans son ouvrage « La fin du management : inventer les règles de demain » paru en 2008, Gary Hamel - Professeur invité de la Harvard Business School et de la London Business School, cofondateur de Strategos, cabinet international de conseil en management et directeur du Management Lab - remet en cause les principes du management actuel qui empêchent l'entreprise de s'adapter au contexte en changement et démontre la nécessité d'inventer un management innovant.
Les études et les statistiques démontrent donc que l’innovation managériale est peu connue et mal appréhendée par les dirigeants et les collaborateurs qui n’en comprennent pas ou peu l’intérêt.
Encore aujourd’hui, dans les entreprises, les évolutions s’effectuent en grande partie sur l’organisation et les systèmes d’information, perçues en grande majorité par les salariés comme un exercice imposé par la direction générale bien loin des principes collaboratifs.
Management traditionnel vs innovation managériale ?
Il serait réducteur d'opposer la vision du management dit traditionnel à celle de l’innovation managériale. Dans la réalité des faits, il est évident que tout n’est pas blanc ou noir, nous oeuvrons entre ces dynamiques, nous devons nous adapter à de nombreux facteurs : environnementaux, culturels au sein l’organisation, relationnels entre les individus,… Il m’est apparu néanmoins intéressant de proposer un regard synthétique qui viserait à éclairer les différences entre ces deux représentations.
Au regard de cette synthèse, tout l’enjeu consiste à faire évoluer nos modèles existants dans l’intérêt des organisations et des individus alors que nous constatons chaque jour le changement de notre monde.
Définissons l’innovation managériale
Selon Gary Hamel, elle consiste à proposer de nouvelles manières de coordonner les personnes entre elles pour le bon fonctionnement de l’organisation, mais aussi pour développer l’envie et le dynamisme organisationnel. C’est un ensemble de micro-actions qui font évoluer les pratiques et par là même les principes du management.
Dans le dernier ouvrage « L’innovation managériale » co-écrit par David Autissier, Kevin Johnson et Jean-Michel Moutot au sein de la chaire innovation managériale et excellence opérationnelle (IMEO) de l’ESSEC paru en 2018, la définition est affinée indiquant qu’elle vise à créer de nouvelles modalités de coopération entre les personnes pour la réalisation des finalités de manière efficace et efficiente en tenant compte des évolutions sociétales.
La prise de conscience que l’innovation managériale n’est pas réservée à la branche Recherche & Développement ou Qualité et Marketing de l’entreprise mais bien à tous les collaborateurs constituerait un premier pas vers le changement. Elle est en effet un processus par lequel les organisations doivent faire jouer leur créativité, leurs habilités pour inventer de nouvelles pratiques.
Voici les principales innovations managériales recensées au sein des entreprises en France dans le cadre des travaux de la chaire IMEO.
Ces nouvelles pratiques ont en commun ce qu’on appelle l’action Learning, l’apprentissage par l’action. L’expérience partagée crée la prise de conscience et facilite ainsi la mise en œuvre opérationnelle, augmentant le taux d’intégration de nouveaux comportements et de solutions dans notre pratique en faveur de l’entreprise.
Ces formes d’innovation managériale ont pour objectif de développer le mode collaboratif et l’agilité en parallèle de l’organisation hiérarchique. L’expérience et l’analyse historique ont aussi montré que l’innovation managériale est un puissant moteur de la conduite du changement pour transformer les organisations face aux enjeux sociétaux.
Alors, on démarre quand ?